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mercredi 3 juin 2009

Bricolages entre amies et réflexions

Jeudi dernier, pour la visite hebdomadaire de Libellule et sa petite famille je me suis retrouvée sans grand chose à offrir pour le goûter. Alors j'ai eu l'idée de faire un gâteau de carotte.

Faute de pommes, contente-toi d'une carotte.
proverbe russe

De fil en aiguille je me suis dit que j'allais chercher à proposer une activité autour de ce légume. Et j'ai consulté internet. Niveau bricolage je n'ai pas trouvé grand chose. Niveau artistique, j'ai trouvé quelque chose d'intéressant mais pas du tout de l'âge des enfants. Je me suis dit qu'on pourrait quand même en faire quelque chose alors j'ai préparé différents éléments.

Pendant que Libellule couchait Pauline pour la sieste, j'ai d'abord présenté à Clémence et Kikabeille ces 3 tableaux trouvés sur le site carotte orange :


et je leur ai demandé ce qu'elles voyaient (formes, couleurs, représentation...)

Puis je leur ai distribué à chacune ces 2 feuilles (photos et dessins récupérés par google images) :

Et je leur ai demandé de faire ce qu'elles voulaient autour de la carotte : s'inspirer des tableaux ou utiliser des collages, de la laine, papiers de couleur (que Kikabeille s'était empressée de trier le matin), crayons etc et faire un dessin.



Kikabeille a tout de suite voulu faire le troisième tableau et a entrepris de découper des lanières dans du papier orange puis s'est très vite lassée et a fait ceci, de sa composition, par dessus :


Clémence a d'abord collé une carotte puis de la laine pour faire les fanes et a très vite voulu se détourner du sujet pour illustrer le conte de Blanche Neige qu'elle venait de découvrir et a donc réalisé ceci (ainsi qu'un autre dessin du conte au crayon de couleur) :

Blanche Neige avec des jambes et des chaussures recouvertes par une robe longue, et une pomme empoisonnée dans la main.



Le 23 janvier dernier j'avais préparé une activité pliage-découpage pour les 2 amies. Cette activité est extraite de ce livre :

Le papillon de Kikabeille est à gauche

C'était la première fois que Kikabeille tournait sa feuille et non ses bras pour suivre le dessin à découper.



Comme d'habitude pour tout ce que l'on fait, je n'ai voulu aider Kikabeille que le moins possible afin qu'elle apprenne en manipulant et pour que ce qu'elle fabrique ou dessine soit bien d'elle et montre ses progressions (je date tout).

Mais pendant longtemps ensuite elle m'a dit qu'elle ne voulait pas garder son papillon, qu'il n'était pas beau, que celui de Clémence était plus beau (comme elle l'avait oublié chez nous, Kikabeille a eu le temps de l'observer).
Libellule avait aidé Clémence plusieurs fois et notamment à plier les ailes. Quant à moi j'avais juste fait remarquer à Kikabeille quand elle pliait dans le mauvais sens ou alors parfois j'avais appuyé d'un doigt sur un pliage moins marqué pour qu'il tienne mieux sans bien marquer le pli, car Kikabeille ne l'avait pas fait. Kikabeille m'a reproché le soir de ne pas l'avoir aidée. Or, comme toujours, je ne fais pas à sa place mais je lui montre d'abord ou je l'aide en parole, je l'encourage, je lui pose des questions pour l'amener à s'interroger sur ce qu'elle fait et trouver les solutions par elle-même. Mais ce jour-là elle n'a sûrement pas perçu ça comme une aide.
Il a fallu ce soir-là que je lui explique que je trouvais son papillon très beau aussi, que j'étais fière de ce qu'elle avait fait, que maintenant elle savait bien découper, qu'elle avait plié moins régulièrement mais que c'était bien fait aussi... mais elle n'a rien voulu entendre, celui de Clémence était plus beau, j'avais mal collé les ailes etc (pourtant à l'endroit exact qu'elle m'avait indiqué après que je lui ai demandé où elle voulait que je les colle)...
Avant même la fin de l'activité elle avait commencé à s'en détacher. Ensuite, elle n'a plus voulu coopérer et n'a pas voulu réessayer de souffler dans une paille pour faire un dessin avec de la gouache liquide (car elle n'avait pas trop réussi la veille sans doute). Clémence, elle, a été contente d'essayer, guidée par sa maman.


J'ai très bien sentie que Kikabeille s'était comparée ce jour-là et j'avais trouvé ça dommage (bien que naturel sans doute) car je cherche justement à ce qu'elle n'entre pas dans l'esprit de compétition qu'on cultive à l'école.

Pour l'activité de la carotte, j'ai pris soin de donner les mêmes éléments aux deux copines mais de leur dire de faire ce qu'elles voulaient, de s'inspirer des tableaux ou pas du tout mais de faire un dessin sur la carotte.
Clémence a demandé à sa maman de l'aider. Du coup, Kikabeille a fait pareil et elle voulait que je fasse à sa place des choses qu'elle sait très bien faire d'ordinaire. J'ai dit non, elle a redemandé, j'ai redit non en lui rappelant que je ne le faisais pas d'habitude et qu'elle savait très bien le faire. Elle n'a pas insisté finissant son dessin toute seule en s'appliquant. Mais elles avaient toutes les deux entrepris quelque chose de complètement différent.
Une preuve de plus à mon avis, qu'il vaut mieux laisser le plus de liberté possible, même autour d'une même activité, à des enfants qui travaillent ensemble. Sinon, la comparaison et peut-être même l'angoisse de faire moins bien ou de ne pas savoir faire quelque chose risque vite d'arriver pour certains. Et, à mon sens, ça n'apporte rien de bon dans un apprentissage, de mettre en position de comparaison ou d'échec (un silence qui n'encourage pas peut y contribuer aussi), ça peut même mener au dégoût au lieu de l'intérêt initial. Peut-être que demander de l'aide à un adulte montre aussi qu'un enfant est en train de sortir de ce qu'il maîtrise ou de ce qu'il a l'habitude de faire et qu'il peut là encore avoir peur de ne pas réussir. Je pense qu'un enfant qui rencontre une difficulté a besoin, bien plus qu'autre chose, de l'encouragement des adultes et de sentir qu'ils ont confiance en lui et en sa capacité à y arriver seul.

Tout ceci me rappelle que l'autre jour Clémence et Kikabeille ont joué à un jeu de memo chez Libellule. Clémence a eu la chance de tomber dès le début du jeu sur 2 cartes identiques. Un peu plus tard elle a demandé à ce que les mamans jouent, Kikabeille a protesté. Libellule a commencé à jouer, Kikabeille a commencé a protester vivement quand ça a été à mon tour en disant qu'elle ne voulait pas que je joue puis ensuite en prenant les cartes que j'avais gagnées en disant que c'était elle qui les avait gagnées. Libellule lui a dit quelque chose qui a commencé par "tu n'es pas chez toi" et qui s'est terminé par "et si je disais que toi tu n'avais pas le droit de jouer". Un peu plus tard Kikabeille a jeté ses cartes sur le jeu et j'ai dû intervenir pour la calmer en l'éloignant.
Après coup, je pense qu'il y avait encore là quelque chose de l'ordre de la comparaison et de la confiance en elle qui se jouait, qu'elle ne voulait pas qu'on intervienne, nous les mamans, dans leur jeu car on était à ses yeux plus fortes que Clémence et elle, et elle n'allait pas y arriver. Mais elle n'a pas réussi à faire comprendre ça autrement qu'en s'énervant parce qu'on n'avait pas écouté son refus que nous participions au jeu, et n'avait pas les mots pour le dire.
J'ai remarqué que ce genre de comportement ne se passait que lorsqu'on se retrouve chaque semaine et qu' à chaque fois que Kikabeille boude, s'énerve ou se braque il y a une question de règle du jeu ou de comportement qui changent et qui ne lui conviennent plus. Et si c'était juste parce que certaines choses lui font perdre ses repères et qu'elle ne se sent plus assez en sécurité pour continuer, au point que ça explose ? Ou même pas assez écoutée dans sa singularité ?

Il va falloir que je creuse cette question car je vois d'ici venir des détracteurs qui me diraient que Kikabeille serait mieux à l'école, qu'elle serait bien obligée de se faire à la comparaison, d'apprendre à vivre avec les autres etc etc.
Moi ce que je vois c'est qu'elle a visiblement encore plus besoin de ne pas y aller pour pouvoir cultiver sa confiance en elle, qu'il n'est pas question ici d'apprendre à vivre avec les autres, c'est autre chose. Il s'agit bien plus d'apprendre à percevoir que tout le monde n'évolue pas au même rythme, qu'elle aussi sait faire des choses que d'autres n'arrivent pas encore à faire, que tout le monde n'a pas le même comportement face à une même difficulté et qu'en plus il peut changer et, bien sûr, qu'il ne faut pas s'énerver mais apprendre à mettre des mots sur ce que l'on ressent pour que les autres puissent ensuite nous comprendre. En un mot il faut d'abord apprendre à se connaître et à s'aimer tel qu'on est avant de pouvoir vivre avec les autres en respectant leurs différences tout en assumant les siennes. Que des choses encore bien difficiles à comprendre à cet âge.

Et bien ça m'a emmené loin cette histoire d'activités à plusieurs !

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